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Professionnels

Une pluralité d’acteurs gravitent autour du système de protection de l’enfance, des nourrices aux juges en passant par les instituteurs. Mais comment définir un « professionnel » de la protection de l’enfance ?
Jusqu’à la fin du 19e siècle, celle-ci est en effet assurée en grande partie par un personnel bénévole ou sans formation spécifique. Les familles nourricières de l’Assistance publique, qui sont dédommagées financièrement, sont-elles des professionnels ? Et les religieuses des pouponnières, qui travaillent bénévolement mais maîtrisent les techniques de soins primaires ?
Si ces activités sont peu reconnues, c’est aussi car elles sont dévolues aux femmes. On associe à ces dernières une capacité « innée » à prendre soin des enfants, grâce à des qualités jugées essentiellement féminines comme la douceur ou la patience. Aujourd’hui encore, ce travail dit de « care », qui mêle pratiques de soin et capacités relationnelles, est assuré par un personnel majoritairement féminin. Mais puisqu’il est jugé relever d’aptitudes « innées » autant que d’une formation spécifique, il est peu ou mal rémunéré.
Néanmoins, la protection de l’enfance se professionnalise entre la fin du 19e siècle et les années 1950. Le travail social se sécularise et se constitue en différents métiers, comme les assistantes sociales ou maternelles. La protection de l’enfance fait aussi appel à de nouvelles compétences. Par sa médicalisation, elle recourt à des figures « d’experts » comme les pédiatres ou les pédopsychiatres. Avec la spécialisation du droit de l’enfance, la justice des mineurs fait appel à ses propres juges.
Si leurs compétences sont variées, ces professionnels se caractérisent par une approche commune prise en tension entre démarche éducative et répressive. Les parents sont accompagnés mais sanctionnés s’ils sont jugés trop défaillants. Les enfants protégés eux-mêmes sont à la fois rééduqués et contrôlés de près, qu’ils soient maintenus à domicile ou placés en institution. À travers la mission des professionnels, ce sont les tensions propres à la protection de l’enfance qui se jouent.

Texte  : Lola Zappi