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Lieux d’accueil

Orphelinat ou famille d’accueil ? La question des structures éducatives pour les « sans famille » se pose avec une acuité nouvelle à partir du début du XIXe siècle, lorsque s’impose progressivement l’idée que le sort de ces enfants ne peut être laissé entre les seules mains de l’Église et de la charité privée, et qu’il réclame l’intervention des pouvoirs publics. En France, ces derniers encouragent le placement familial des enfants abandonnés, reprenant en quelque sorte la tradition inaugurée à la fin du XVIIe siècle par Saint Vincent de Paul avec l’appui du pouvoir royal. Les hospices dépositaires qui essaiment alors dans tous les départements sont donc conçus comme des lieux de passage, puisqu’une fois leur admission enregistrée les enfants sont envoyés à la campagne dans des familles nourricières. Pour bon nombre d’orphelins c’est plutôt le placement collectif qui prévaut, généralement dans des établissements tenus par des œuvres religieuses. Le modèle nourricier de l’assistance publique n’est cependant pas immuable. Il se heurte dès les années 1920 à des difficultés croissantes de recrutement des familles d’accueil, et à partir de la Seconde Guerre mondiale, les enfants assistés, à l’exception des « nés sous x » qui sont systématiquement proposés à l’adoption, sont de plus en plus souvent placés dans des foyers.
Quant aux hospices départementaux, ils évoluent eux aussi. De simples lieux d’admission et d’aiguillage vers les placements familiaux ou collectifs, ils s’affirment peu à peu comme des lieux où s’élaborent et se diffusent la médecine des enfants et la puériculture. Ils deviennent également des lieux de soins, non seulement pour les enfants assistés mais aussi pour les enfants des familles populaires par le biais des consultations pédiatriques. Dans leur sillage, à mesure que s’étend le périmètre de l’assistance à l’enfance et à la suite d’expériences pionnières de la seconde moitié du XIXe siècle, se multiplient les lieux destinés à accueillir les enfants qui ne sont pas séparés de leurs parents. Maisons maternelles, dispensaires et consultations de nourrissons, crèches, gouttes de lait… Des « sans famille » aux enfants « ordinaires », se tisse ainsi progressivement un réseau de lieux d’accueil, dessinant le vaste archipel de la protection de l’enfance d’aujourd’hui.

Texte  : Antoine Rivière